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Jour 9

Journal de bord de la traversée du Pacifique
Jour 9
Kids and Kites (Furnishing Fabric), Eleanor and Henry Kluck, 1964 ©Elenhank Designers

Grand soleil. Aujourd'hui, on fête les 1000 miles nautiques. Lulu nous offre des tableaux faits en gommettes. Ce soir, si tout va bien, on passera les Galapagos. Le jour est tranquille et le vent nous fait faire des pointes. Solène veut qu’on barre chacun son tour pour soulager le pilote automatique, qui tourne sans relâche. Je barre deux heures et fais une pointe à 10.1 nœuds.

Une raie qui brille !

Pâtes bolo à midi, Ursula le Guin, toujours, après le repas. Je lis quasiment toute l'après midi.

Plus tard, on regarde tous ensemble le ciel étoilé. La nouvelle lune et le ciel dégagé laissent tout l'espace aux étoiles. À côté de moi, Lulu dit :

Il faut suivre le chemin des étoiles pour aller en Polynésie.

La poésie, chez les enfants, parait être un langage naturel, car comment pourrait-elle savoir que oui, pour aller en Polynésie, il faut suivre le chemin des étoiles, chemin que des milliers de polynésiens ont suivi il y a plusieurs centaines d’années pour s’installer sur ces îles, qu’on espèrent atteindre à grand renfort de GPS, de bulletins météo et de cartes numériques ? Comment pourrait-elle, sinon, avoir l’intuition que ces étoiles, qui s’étalent dans un apparent chaos, forment des chaînes que les humains ont déchiffré puis suivi depuis qu’ils sont sorti de la caverne ?

La poésie est un langage naturel pour les enfants. La question qui vient alors naturellement est : que devient-il, ce langage, quand on grandit ? Est-il recouvert, endormi, ou est-il perdu ?

Merahi metua no Tehamana (Tehamana Has Many Parents or The Ancestors of Tehamana)
Merahi metua no Tehamana, Paul Gauguin, 1893, CC0 Public Domain Designation